Covid-19 et quartiers populaires : un impossible confinement
En 2020, la crise sanitaire et ses confinements ont rappelé l’ampleur des préjugés et des représentations sur les quartiers populaires notamment des jeunes mais aussi sur les inégalités face au logement et à la santé dans ces quartiers.
Le traitement médiatique en est une parfaite illustration. Dès le début du confinement, une partie des responsables politiques et des éditorialistes ont ciblé les populations des quartiers populaires comme étant incapable de respecter le confinement. Des articles, des vidéos et des photos montraient ces indiscipliné-e-s : une mère de famille de retour du marché, des jeunes devant des immeubles… et des policiers en train de verbaliser.
La ritournelle sur les zones de non droit s’est accrue d’un nouveau couplet : les habitant-e-s des quartiers populaires sont responsables de la propagation du Covid 19. Aucune analyse sur les raisons de la méfiance que certain·e·s (dans les quartiers populaires ou ailleurs) pouvaient manifester au vu du flou des directives des pouvoirs publics. Aucune analyse sur les conditions de vie dans ces quartiers : logements surpeuplés, désertification médicale, emplois de premier·e·s de cordées, etc.
Si pour l’ensemble de la population le logement a représenté un changement anthropologique car il n’était plus l’espace protégé des contraintes extérieures (travail, école, etc…) ou parfois un refuge sécurisé face au virus, dans les quartiers populaires cette question s’est posée de manière plus complexe et plus délicate. Comme le dit Camille Noûs, le confinement « met ainsi particulièrement à l’épreuve les familles des cités, rendant difficile voire impossible, ces petits aménagements qui reposent sur l’alternance entre sortie et entrée des membres du foyer offrant des espaces-temps indispensables à l’équilibre de chacun et du groupe. Avant de condamner moralement les habitant-e-s des cités peut-être conviendrait-il de s’interroger sur les conditions matérielles d’existence et sur les inégalités face au confinement ».
Les habitant·e·s des quartiers populaires ont joué un rôle essentiel dans la bonne marche de la société lors du confinement
Les analyses qui sortent du rapport de l’ORS IDF sur le premier confinement montrent qu’en Île-de-France, plus de 700 000 travailleurs ont poursuivi leur activité sur leur lieu de travail habituel dont 500 000 plus particulièrement exposés, c’est-à-dire dans des métiers au contact de malades Covid-19 ou occasionnant de nombreux contacts sociaux.
Parmi eux, les travailleurs de la santé à l’hôpital et en ville, le personnel funéraire, les commerçants désignés comme « essentiels » (bouchers, boulangers, buralistes et leurs personnels), mais aussi les livreurs, agents de propreté, facteurs, conducteurs de transport public, les pompiers et forces de l’ordre.
En Ile-de-France par exemple, ces personnes résident le plus souvent en Seine-Saint-Denis et en Seine-et-Marne, à l’exception des dentistes, kinésithérapeutes, sages-femmes et vétérinaires plus fréquemment dans les départements favorisés (Paris, Hauts-de-Seine, Yvelines).
La répartition en Ile-de-France des travailleurs-ses dit-e-s « premier·e·s de cordée » lors du premier confinement est à l’image du reste du territoire : de nombreuses personnes vivant dans les QPV exerçait des professions exceptées de télé-travail. Ils et elles ont été plus exposé·e·s au virus tout en étant mal-traité·e·s médiatiquement.