Faire entendre les voix des personnes sans papiers enfermées
Tout le monde peut se rendre dans un centre de rétention administrative (CRA) mais qui y a déjà mis les pieds ?
Les CRA sont des lieux d’enfermement et de privation de liberté, des prisons pour sans papiers. Les CRA sont un des symboles les plus abjectes du racisme d’État.
Les personnes enfermées ont le droit de communiquer avec l’extérieur et le droit de recevoir des visites. Nous pensons qu’il est nécessaire d’exprimer notre soutien aux personnes enfermées et faire entendre leur parole sur ce qu’il se passe dans ces prisons qui ne disent par leur nom.
Vous pouvez télécharger la brochure ci-dessous et/ou lire le contenu juste ici :
C’EST QUOI UN CRA ?
JURIDIQUEMENT
Au début des années 80, deux lois ont légalisé et encadré une pratique coloniale persistante : l’enfermement des personnes étrangères en l’absence de condamnation judiciaire.
Il s’agit de la loi du 10 janvier 1980 qui prévoit l’enfermement des personnes étrangères et le sépare de l’administration pénitentiaire. Puis, la loi du 29 octobre 1981 a organisé l’encadrement des centres et leur gestion par la police et la gendarmerie nationale. L’objectif assigné à la rétention administrative est l’expulsion des personnes sans papiers.
L’État enferme pour pouvoir expulser plus facilement.
Au gré des réformes, la durée maximale de la rétention et le nombre de places en rétention administrative n’ont fait qu’augmenter. Aujourd’hui, il est légal d’enfermer une personne pendant 90 jours. En 2022, 42353 personnes ont été enfermées dans les 25 CRA (et autres locaux de rétention administrative).
Des circulaires de 2022 (3 août et 17 novembre) et la réforme 2023 prévoient l’intensification de l’enfermement : plus de situations permettant de retirer les papiers, de ne pas les accorder, plus d’obligations de quitter le territoire français, plus de places en rétention.
POLITIQUEMENT
Un extrait des écrits du collectif à bas les CRA nous parle particulièrement :
Les violences policières physiques et morales, les menaces, le racisme et les humiliations y sont quotidiennes.
Les prisonnier-e-s ont été jugé-e-s coupables de ne pas avoir les “bons papiers”.
« Lieux d’isolement et d’abus, les CRA sont un des maillons d’une chaîne bien plus grande. Une chaîne qui va des relations néocoloniales qui organisent les visas et les accords bilatéraux aux frontières militarisées, des centres d’hébergement et d’accueil aux prisons, des préfectures à la commission d’asile, des tribunaux aux rafles et aux contrôles au faciès dans les rues et les gares. »
« Par ailleurs, on constate que les liens entre prisons et CRA s’intensifient : toujours plus de personnes entrent en CRA après une peine de prison. Ces dernières années, de nombreux procès et d’allers–retours entre CRA et prisons pour des révoltes et des tentatives d’évasion ont eu lieu. »
A la FASTI, nous partageons les idées de ce collectif. Leurs pratiques de visite ont inspiré cette brochure. Nous souhaitons nous saisir plus fort de cette question et faire vivre notre mot d’ordre : la fin de l’enfermement.
Certaines personnes ont un droit d’accès ouvert par la loi (parlementaires, bâtonnier-e-s, journalistes). Certaines associations titulaires de marchés publics pour assurer l’assistance juridique dans les CRA y travaillent même. Elles ne sont pas en capacité de dénoncer suffisamment les atteintes aux droits fondamentaux des personnes par la police.
Il y a besoin de plus de monde pour exprimer notre solidarité aux personnes enfermées, faire entendre leur parole, dénoncer plus haut et fort ce qu’il se passe dans les CRA.
CONCRÈTEMENT
Tous les CRA sont différents.
Les règles varient selon les endroits, bien que ces lieux aient un modèle de règlement intérieur. Les fouilles à l’entrée sont variables. Les conditions de parloir pourront également être très différentes d’un CRA à l’autre. La durée de la visite pourra être limitée ou non.
Il vous sera demandé une pièce d’identité. La seule nourriture admise est généralement industrielle. Les paquets de cigarettes le sont également.
Autrement, pour les CRA les plus éloignés de vous, il y a toujours la possibilité d’appeler les cabines téléphoniques, lorsque celles-ci fonctionnent. Dans toutes les CRA, il y a des cabines téléphoniques publiques souvent situées dans les cours de promenades et donc accessibles à tous. Vous pouvez joindre directement des prisonnier-e-s, demander à parler à la personne que vous cherchez, ou apporter votre solidarité.
La plupart sont difficiles d’accès, cachés, mais pas tous. Par exemple, le CRA de Bordeaux se situe en centre-ville à l’intérieur de l’hôtel de police. Il se trouve précisément en sous-sol du bâtiment avec aucune fenêtre donnant sur l’extérieur. Il n’y a donc aucune lumière directe au sein du CRA. La seule ouverture est une cour au milieu du CRA, donnant sur le parking couvert de l’hôtel de police … Les conditions de rétention sont inhumaines.
Aller faire une visite nécessite de se préparer et plusieurs modalités sont possibles pour témoigner notre soutien. Elles dépendent du CRA. Le but de cette brochure est d’en présenter quelques-uns d’abord et à terme, couvrir au moins les CRA proches des ASTI.
Vous pouvez appeler pour apporter de la solidarité depuis l’extérieur et/ou pour proposer d’aider à faire sortir la parole de l’intérieur. Dans ce cas, faites attention à anonymiser les récits des prisonnier-ère-s : s’il ne peut pas y avoir théoriquement de répression judiciaire, les flics répriment souvent celles et ceux qui se font entendre. En pratique ça veut dire, ne pas publier les prénoms ou noms, bien leur demander leur accord avant de diffuser un audio ou leur parole sur internet.
Bien expliquer que vous êtes à l’extérieur, que vous n’êtes pas journaliste, ni avocat-e ou flic, et que vous ne pourrez rien faire pour obtenir la libération des personnes.
Quelques questions-types à poser pour engager la conversation :
Combien de personnes sont enfermées en ce moment dans le CRA ? Y a-t-il des libérations régulièrement au juge des libertés et détention (JLD), sur quel motif ? Quelle est la situation dans le CRA ? Y’a-t-il beaucoup d’expulsions, vers où ?
Si vous comptez appeler régulièrement, il est préférable de demander le numéro de téléphone des personnes concernées (les téléphones portables sans caméra sont autorisés) afin d’avoir une discussion plus directe et peut être moins surveillée.
Il est aussi envisageable d’avoir un téléphone collectif dont le numéro est donné aux personnes retenues.
=> Indispensable : le nom et le prénom de la personne visitée
Il y a deux moyens d’entrer en contact avec les personnes retenues en CRA :
Il est possible de leur rendre visite et d’appeler les cabines qui se trouvent à l’intérieur de chaque CRA.
Les visites sont plus compliquées qu’un appel aux cabines, car pour rendre visite à une personne retenue il est indispensable d’avoir son nom et son prénom. Il y a plusieurs moyens de les obtenir, le plus simple étant l’appel des cabines pour obtenir le nom de personnes qui veulent être visitées. Une fois le nom obtenu, il est possible de rencontrer la personne au parloir. Parfois, une personne de l’association d’assistance juridique travaillant sur place peut avoir repéré des personnes en demande de visite. C’est toutefois très rare et aléatoire selon les CRA, associations, personnes. Les contacts des associations travaillant sur place (Groupe SOS, forum réfugiés, FTDA, la Cimade, Solidarité Mayotte) sont disponibles dans le rapport annuel réalisé par ces mêmes associations téléchargeables sur leurs sites internet.
VISITER LES CRA
ALLER AU CRA DE BORDEAUX
Numéros des cabines : 0557268709 et 0557016822
À Bordeaux, le CRA se trouve au sous-sol de l’hôtel de police, à l’arrêt de tram A du même nom.
Il faut entrer dans le commissariat pour rejoindre le CRA. En entrant dans le bâtiment, on arrive dans un premier sas dans lequel on peut y entrer qu’individuellement. Une première fouille est réalisée : fouille rapide au corps et vérification complète des sacs. Passé ce sas, on entre dans le hall d’accueil.
Il faut alors se présenter à l’accueil et expliquer qu’on souhaite rendre visite à une personne retenue au CRA. Le policier de l’accueil demande alors les identités des visiteur-eures (nom, prénom, numéro de téléphone et adresse + carte identité) et le nom et le prénom de la personne visitée. Il est possible que le policier demande si on la connaît, ce à quoi on répond « oui oui ».
Les visites à deux ont été interdites un temps pendant le covid, mais depuis plusieurs mois elles sont à nouveau possibles. Si l’accueil assure que ce n’est pas possible, il ne faut pas hésiter à insister.
Ce qui est en revanche toujours interdit à Bordeaux c’est d’apporter de la nourriture aux personnes visitées. On conseille de systématiquement demander s’il est possible d’entrer avec de la nourriture.
On peut alors se diriger vers la salle d’attente. Le temps d’attente est aléatoire, il dépend du monde qui vient faire des visites.
Il nous semble important d’être attentifs et attentives à la présence éventuelle de proches de personnes retenues dans la salle d’attente afin de leur laisser la priorité.
Une fois dedans :
Une porte dans le fond s’ouvre et la Police Aux Frontières (PAF) sort. On vient nous chercher pour nous conduire au sous-sol du commissariat. Accompagné-e par au moins un-e agent de la PAF, on descend par un ascenseur.
Arrivée en bas, on dépose nos affaires dans des casiers (un casier par personne), on passe un portic puis une dernière fouille au corps est réalisée, plus stricte que la première fois. Nos cartes d’identité sont à nouveau demandées et cette fois gardées par la PAF jusqu’à la fin de la visite.
Lors d’une visite, les clés du casier ont été gardées par la PAF. On ne sait pas ce qu’ielles font pendant qu’on est au parloir, donc on conseille de prendre des précautions quant aux affaires qu’on laisse dans ce casier, dont le portable.
La visite au parloir :
Le parloir se trouve sur la gauche. Il arrive que la personne soit déjà présente dans le parloir. Mais le plus souvent, nous y sommes avant elle.
Il y a deux parloirs à Bordeaux, un uniquement accessible par les avocat-es des personnes retenues et un deuxième pour toute personne qui rend visite. Ce deuxième parloir est une pièce toute petite, sans fenêtre, avec une table semblable à celle de pique-nique. Au coin opposé à la porte se trouve une caméra. On ne sait pas si elle prend constamment en vidéo et si elle enregistre le son, mais elle est là...
On a alors 30 minutes minimum de visite. Cela dépend du nombre de personnes qui attendent pour faire des visites. Il est possible d’écourter la visite en sortant du parloir. Sinon, la PAF ouvre la salle et nous demande de sortir. On récupère alors nos affaires, nos cartes d’identité, on remonte par l’ascenseur et on sort.
Petits conseils :
On conseille de ne pas prendre le portable en visite. À Bordeaux, la PAF a accès au casier où on doit y laisser nos affaires. Elle a donc accès à nos affaires si elle le souhaite, dont le portable si on le prend avec nous.
Un téléphone avec une caméra sera toujours refusé en visite car il n’est pas autorisé de prendre des vidéos des lieux et des personnes. La question se pose alors pour la prise de notes de la discussion. À Bordeaux, il nous est refusé de prendre des notes, alors que dans d’autres villes cela est autorisé. Tout comme la nourriture refusée à Bordeaux, on pense qu’il est quand même souhaitable de demander si on peut aller au parloir avec un dictaphone ou une feuille et un stylo pour prendre des notes.
Si on n’a pas eu l’occasion de prendre des notes pendant la visite, il est préférable de vite enregistrer ce qui s’est dit pendant la visite pour ne pas oublier de détails.
CRA DE REGION PARISIENNE
En Ile-de-France il existe quatre prisons pour sans papier : Plaisir (78), Palaiseau (91), Vincennes (75) et Mesnil-Amelot (77).
ALLER AU CRA DE PLAISIR
Il n’y a qu’une cabine à Plaisir, n’hésitez pas à essayer d’appeler plusieurs fois pour parler à un prisonnier, parfois la police essaye de répondre à leur place : 01 34 59 49 80
Le CRA de Plaisir est le plus petit d’Ile de France avec une trentaine de places. Il est situé dans le commissariat de la ville.
Pour y accéder :
- Transilien N, depuis Gare Montparnasse, puis soit marcher jusqu’au 889 avenue François Mitterrand -78370 Plaisir- ou prendre le bus 8 jusqu’à l’arrêt François Mitterrand.
Parloirs tous les jours de 9h30 - 12h et 13h30 - 18h. Il faut s’adresser à l’accueil du commissariat qui appelle les agents de la PAF qui viennent vous chercher. Ca commence par une fouille, puis on laisse ses affaires et on accède à un petit box pour un parloir de maximum 30 minutes. La police pose régulièrement beaucoup de questions pour savoir “pourquoi on vient”, il n’y a pas d’obligation -au contraire- pour leur dire la vérité. Généralement il n’est pas possible de ramener à manger en parloir.
ALLER AU CRA DE PALAISEAU
3 cabines téléphoniques : 01 60 14 90 77, 01 69 31 29 84, 01 69 31 17 81
La prison est située derrière la gendarmerie de Palaiseau, au 13 rue Emile Zola.
Pour y accéder :
- RER B, station Palaiseau (direction Saint Rémy les Chevreuses depuis Paris) puis 15 minutes de marche.
Parloirs : tous les jours de 9h à 11h puis de 14h à 17h. N’hésitez pas à arriver un peu en avance le matin. Trente minutes avant la fin des horaires, il devient plus compliqué d’obtenir un parloir.
On est palpé et passé à la raquette puis ramené dans un box à gauche de l’accueil du CRA. On doit laisser ses affaires sur le banc à l’entrée. Les flics passent régulièrement regarder ce qu’il se passe pendant le parloir et se permettent parfois d’interrompre si quelque chose ne leur convient pas.
ALLER AU CRA DE VINCENNES
(extrait du blog abaslescra.noblogs.org)
A Vincennes, il y a 3 bâtiments : le CRA1, le CRA2A et le CRA2B.
Cabines :
Vincennes 1 : 01 45 18 59 70 – 01 45 18 12 40 – 01 45 18 02 50
Vincennes 2A : 01 48 93 69 47 – 01 48 93 69 62 – 01 48 93 90 42
Vincennes 2B : 01 48 93 99 80 – 01 43 76 50 87 – 01 48 93 91 12
C’est une prison pour sans papier cachée dans un coin du bois de Vincennes à côté de l’hippodrome.
Pour y accéder :
RER A, station Joinville Le Pont (direction Boissy Saint léger depuis Paris)
Bus : 77, 101, 106, 108, 110, 112 201 et 281
Adresse : 4 avenue de l’Ecole de Joinville – 75012 Paris
La prison est coincée entre une école de policiers (qui s’entrainent et se forment là) et une école de chiens de policiers.
Toutes les informations et les conseils qu’on peut donner ici peuvent changer très rapidement : selon les équipes de policiers et les nouveaux règlements imposés par la PAF
Quand on arrive devant le CRA il faut aller parler aux policiers qui sont posés dans un poste et dire qui on va voir au policier qui sort de la guérite... A Vincennes il faut une carte d’identité ou un titre de séjour pour rentrer, sinon ça peut être la galère. Mais de temps en temps y a des gens qui passent avec leurs récépissés et ça marche. Ca se joue beaucoup au rapport de force que vous pouvez avoir avec les policiers. Parfois ils refusent une visite si on a seulement un permis de conduire (surtout d’autres pays européens).
Il y a un petit abri en bois en face de l’entrée pour attendre.
Les parloirs sont ouverts tous les jours de 9h à 20h, pas besoin d’avoir une autorisation ou un rdv.
La visite dure 30 minutes, et les policiers essayent souvent de gratter quelques minutes : faites attention !
A savoir : Beaucoup de monde le week-end, surtout l’après-midi, donc des fois plusieurs heures d’attente.
Quand c’est votre tour, généralement deux policiers viennent vous appeler à l’entrée. De là on va vous amener dans un petit box pour une fouille. Ce n’est pas le CRA où ils sont les plus chiant sur les fouilles, mais ça dépend toujours de l’équipe et du zèle des policiers sur qui on tombe.
De là on est amené un peu plus loin vers les parloirs. C’est au 1er étage de préfabriqués.
Près de la porte à l’intérieur il y a un banc pour poser ses affaires qu’on ne peut pas prendre au parloir (sac, téléphone avec caméra) et un bureau où sont posés des policiers de la PAF (police aux frontières).
Les parloirs se font dans cette salle, où il y a quatre tables prévues pour les visites.
A Vincennes le prisonnier que vous allez voir est déjà là (généralement). En fonction de la table où vous êtes, vous pourrez parler plus ou moins librement en étant plus ou moins écouté.
Il y a quatre tables, donc maximum quatre parloirs en même temps.
Vous pouvez venir à deux, et voir au moins deux prisonniers en même temps.
Le nombre de policiers présents dans la salle peut varier de deux à une dizaine.
Ce qui rentre en parloir : livre, magazine, petit savon / shampoing, bouffe industrielle fermée sous vide/ téléphone sans caméra-photo et puce / clopes / Boissons industrielles sans alcool/ vêtements.
Pour manifester sa solidarité de dehors / parloirs sauvage :
Selon où sont les prisonnier-e-s à qui on veut montrer notre solidarité il faut faire attention, on est rarement entendu par les trois bâtiments en même temps.
Deux possibilités :
- aller devant la prison, à l’entrée des parloirs où on peut être entendu du CRA1. Problème : on est devant l’entrée de l’école des policiers, facilement nassable et pas proche de la route.
- aller derrière la prison : on peut y être entendu du 2A et du 2B selon comment on avance vers le bois. Problème : y a l’entrée de l’école des chiens policiers (la cynophile) qui sortent rapidement et sont souvent énervés.
ALLER AU CRA DU MESNIL AMELOT
(extrait du blog abaslescra.noblogs.org)
Plusieurs cabines sont hors-service et n’ont toujours pas été réparées (parfois depuis plus de 2 ans) :
01 60 54 16 57/ 56 et 01 60 54 16 55/53
Bâtiment familles : 01 60 54 27 89 et Bâtiment femmes : 01 60 54 16 48
La Cimade :
CRA n° 2 : 09 72 42 40 19 / 09 72 41 64 90 et CRA n° 3 : 09 72 41 57 14 / 01 84 16 91 22.
Ne pas hésiter à les relancer quand on cherche un-e proche ou qu’on veut apporter des papiers pour le passage devant le JLD.
C’est une des plus grandes prisons pour sans papier de France, les préfectures peuvent y enfermer officiellement au maximum 240 personnes. Il est divisé en plusieurs centres de rétention.
Le CRA 2 et le CRA3 : Ces deux prisons sont soi-disant indépendantes l’une de l’autre : les règles peuvent donc changer d’un CRA à l’autre. Le CRA2 est le seul d’Ile de France où peuvent être enfermées des femmes ou des familles. Il y a un bâtiment destiné aux premières et un autre aux secondes, mais dans les faits des familles/couples sont parfois placés dans le bâtiment des femmes.
Ces deux prisons sont collées à une caserne de CRS et à une annexe du TGI où il n’y a que des audiences de juge de liberté et détention (JLD).
Pour y accéder :
–En transport en commun : RER B arrêt « Aéroport CDG Terminaux 1-3 » puis bus n°701 ou 702, arrêt « Route nationale (RN) ». Depuis Gare du Nord ça peut prendre entre 40minutes et 1h pour arriver au CRA.
Adresse : 2-6 rue de Paris 77990 Le Mesnil-Amelot
Horaires : lundi au dimanche de 9h – 12h et de 13h30 – 18 h
Les parloirs peuvent durer 30 minutes minimum et beaucoup plus longtemps si les flics ne s’y opposent pas. En temps normal on peut venir à plusieurs en parloir (plusieurs adultes ou adultes & enfants).
Le parloir se passe dans un box, il y a moyen de discuter sans être trop écouté. Sauf quand les flics décident de vous mettre la pression, dans ce cas ils restent généralement des deux côtés du box où il y a des vitres pour vous voir et vous écouter.
Il y a deux fouilles : une à l’entrée du centre avec palpation, ouverture du sac et première détection de métaux. Les papiers d’identité ou titre de séjour sont demandés à ce moment-là.
Il y a une deuxième fouille à l’arrivée vers les box (les parloirs ne sont pas au même endroit au CRA2 et au CRA3). Là c’est un passage sous le portique et une palpation qui peut être plus intense. Les affaires qui ne sont pas amenées dans le box sont déposées dans un casier verrouillé dans le bureau des flics dont on conserve la clé pendant le parloir.
Ce qui peut rentrer change selon les flics qu’on a face à nous et selon le CRA.
En tout cas possibilité de manger ensemble dans le box + de prendre papier/stylo avec soi et un téléphone (pas un smartphone) sans caméra ni appareil photo
Produits/denrées :
– nourriture « frais » à manger dans le box uniquement (généralement ils ne permettent pas aux retenu-es de repartir du parloir avec des produits « frais » c’est à dire généralement tout ce qui est déjà ouvert et des fruits ou aliments cuisinés)
– nourriture « sec » possible à ramener dans le box ou à le déposer à la fouille
– produits hygiène à déposer à la fouille
– tabac
– vêtements, livres... généralement possible mais ça dépend aussi de l’arbitraire des flics qui peuvent décider que telle ou telle chose ne passe pas.
Pour manifester sa solidarité de dehors / Parloirs sauvages :
Selon où sont les prisonnier-e-s à qui on veut montrer notre solidarité, il faut faire attention, on est rarement entendu par les trois bâtiments (CRA 2 / bâtiment des femmes / CRA3) en même temps.
Deux possibilités :
– aller devant la prison, à l’entrée des parloirs où on peut être entendu avec une grosse sono par une partie du CRA3 (qui est à droite quand on est face à l’entrée)
– aller derrière la prison : il y a un champ de betterave (selon la période de l’année). Quand on est face au CRA de derrière, à droite on peut être entendu du CRA2, au milieu du bâtiment des femmes et à gauche du CRA3.
CONCLUSION : POURQUOI FAIRE CES VISITES ?
Pour les personnes retenues
Les raisons relatives aux intérêts directs et individuels des personnes retenues ne sont pas intangibles et absolues. Ce que nous considérons être “pour” les personnes retenues, peut parfois s’avérer indésirables. Il est possible qu’elles ne souhaitent pas être visitées, pas plus qu’elle ne souhaite que leur témoignage soit diffusé.
Il faut toujours garder à l’esprit la volonté première des personnes visitées.
Cela dit, les visites permettent aux personnes retenues de savoir qu’elles sont considérées. Cela met en lumière que leur enfermement n’est pas ignoré de tous-tes, et a fortiori, que leur bien-être et leur situation sont importants pour les personnes visiteuses.
Par ailleurs, certaines personnes retenues n’ont pas de visites familiales ou privées de par l’éloignement géographique du CRA vis-à-vis de leur lieu de résidence, ou de par la conjecture de leur situation personnelle. Pour ces personnes isolées, les visites pallient alors un manque de contact avec l’extérieur, lequel peut s’avérer très difficile à vivre.
Les visites permettent également, pour les personnes retenues qui le souhaitent, de faire entendre leur voix, leur vécu, leur témoignage. Il peut être important pour elles de savoir que ce qu’elles vivent - maltraitances, violences policières, traumatismes de l’enfermement - est relayé à l’extérieur et suscite indignation et revendications.
La parole des personnes enfermées peut être invisibilisée par les personnes intervenant dans les CRA, par nous-mêmes. Nous devons être vigilant-e-s, pour des raisons évidentes de liberté des un-e-s vs enfermement des autres, d’accès aux moyens de communications, les témoignages des personnes qui visitent peuvent prendre la place des témoignages des personnes qui vivent effectivement l’enfermement.
La parole la plus légitime sur ce qu’il se passe à l’intérieur des CRA est celle des personnes enfermées.
Dans d’autres cas, les personnes retenues peuvent informer les visiteurs et visiteuses de futurs évènements tel l’éloignement d’un-e retenu-e, et en ce sens, une présence militante à l’aéroport concerné peut empêcher l’éloignement effectif de la personne.
Ces visites sont également l’opportunité de pallier certains besoins matériels et donner des portables, de la nourriture, etc.
Pour dénoncer juridiquement les violations de droits
A fortiori, en tant que visiteurs et visiteuses nos actions de recueillement de témoignages peuvent servir des actions en justice en collaboration avec des avocat-e-s, ou des dénonciations auprès du DDD et/ou du CGLPL, quant aux conditions de vie indignes ou violences policières.
Pour la présence politique
D’un point de vue politique et militant, de telles visites sont également très importantes. Dans ces lieux d’enfermement, les maltraitances et les violences policières restent cachées et tues. Notre présence permet de montrer que les personnes retenues ne sont pas seules, qu’elles ont un soutien qui n’est pas que familial ou privé, émanant de la société civile.
Notre présence s’inscrit également dans une démarche plus large, celle de porter un message revendicatif de fermeture de tous les CRA.
Cette action de visite permet d’alimenter une pratique militante et de développer des outils qui serviront les intérêts des personnes retenues.
En cas de lutte collective à l’intérieur du centre de rétention, n’hésitez pas à contacter la FASTI ou les différents collectifs qui se battent contre les centres de rétention : à Lyon, Paris, Marseille ou Toulouse (même si c’est un peu loin !)
Les témoignages retranscrits ou audio pourront être diffusés via leurs sites.
Pour lire des témoignages de personnes retenues, des articles, trouver les numéros des cabines et autres infos :
https://abaslescra.noblogs.org/
Pour des données chiffrées, des adresses, etc. :
https://www.lacimade.org/publication/rapport-2022-sur-les-centres-et-locaux-de-retention-administrative/