Discriminations territoriales en Guyane

Article par Thibaut de l’ASTIPA de Guyane
En Guyane française, seul territoire toujours occupé par un pays européen en Amérique du Sud avec les Islas Malvinas (Malouines), les discriminations prennent de multiples formes et notamment, forme la plus visible, la discrimination territoriale exacerbée depuis les années 2000 avec l’apparition de deux frontières intérieures. Discriminations territoriales, à la fois à l’intérieur du territoire guyanais avec l’instauration en 2007 de deux barrages routiers sur les seules routes du littoral guyanais qui sillonnent la Guyane d’est en ouest ; mais aussi à travers des législations d’exception qui visent particulièrement les ressortissants brésiliens et enfin avec la multiplicité et la répression sévère envers les nombreux « squats ».

Les barrages routiers = frontières intérieures
La Guyane française est sillonnée par seulement deux axes routiers. La RN 1 à l’Ouest en direction de Saint Laurent du Maroni ville frontière avec le Surinam voisin et la RN2 en direction de Saint Georges de l’Oyapoque à l’Est, ville frontière avec le Brésil. Depuis 2007 ces deux principaux axes routiers sont coupés par l’instauration de deux barrages routiers aux contrôles permanents et systématiques, situés à mi-chemin sur ces deux routes. L’un est situé à l’Ouest à Iracoubo et l’autre sur la commune de Régina à l’Est. Le dispositif sert en quelque sorte de « ceinture » de sécurité autour de Cayenne le chef lieu et Kourou qui abrite la base spatiale. Les objectifs initiaux tels qu’ils ont été présentés aux habitants de Guyane, de ces barrages étaient la lutte contre l’orpaillage et les trafics mais aussi et surtout la lutte contre l’immigration clandestine. Et c’est bien ce dernier objectif qui est devenu l’usage principal de ces barrages routiers. Un usage discriminant puisque ces deux barrages permanents sont devenus au fil des ans de véritables frontières intérieures infranchissables pour les ressortissants étrangers en situation irrégulière et discriminants pour les habitants de l’Ouest et de l’Est guyanais.
Impossible pour bon nombre de jeunes de poursuivre leur études entravées par ces deux barrages alors que la plupart des établissements, tel que les lycées ou les facultés, se situent à Cayenne. Impossible pour bon nombre de patients de pouvoir suivre leur traitement ou leurs examens médicaux, etc.…
Des barrages qui entravent la liberté de circulation au sein d’un département et qui stigmatisent les populations de l’Ouest et de l’Est Guyanais dont la population de Cayenne ou de Kourou devrait se protéger et qui serait à la fois source de la délinquance et de tous les trafics ! Une discrimination territoriale en bonne et due forme.

Les ressortissants brésiliens contraints de circuler avec un visa.

L’autre aspect aberrant et discriminant en Guyane tient au sort des ressortissants brésiliens qui souhaiteraient se rendre en Guyane depuis le Brésil. En effet si la France métropolitaine n’impose pas l’obligation préalable d’un visa pour venir sur le territoire français pour un court séjour (inférieur à 3 mois) (un simple tampon d’entrée et de sortie) ; en Guyane les ressortissants brésiliens, à l’instar des autres ressortissants des pays tiers, sont soumis à l’obtention d’un visa de court séjour pour venir séjourner sur le territoire. En effet la Guyane frontalière d’une des régions les plus pauvres du Brésil, l’Amapa, cherche à se prémunir de l’arrivée de ces « pauvres brésiliens » alors que dans le même temps elle encourage les riches, la bourgeoisie brésilienne à rejoindre la France métropolitaine . Une double discrimination donc à la fois économique mais aussi raciste envers certains ressortissants étrangers

Les nombreux « squats », véritables bidonvilles au cœur des villes.

La Guyane abrite un nombre important de « squats » ou véritables bidonvilles au cœur des villes.
Des squats qui en Guyane ont la particularité d’être majoritairement occupés par des ressortissants étrangers.
Des squats qui sont la cible des répressions systématiques de l’Etat français qui n’a eu de cesse de les repousser vers l’extérieur des villes. Ces quartiers ou bâtiments isolés regroupent une population souvent hétérogène administrativement (migrant-e-s avec ou sans papiers) et qui se retrouve ainsi discriminée territorialement et violemment persécutée.

Il est indéniable aujourd’hui que la discrimination territoriale s’est insinuée dans toutes les sociétés contemporaines. Une discrimination territoriale qui touche de plein fouet les migrant-e-s. Que ce soit par les frontières, les barrages routiers, les squats..., la discrimination territoriale exacerbe les tensions et les « a priori » racistes et xénophobes.
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